Note du dimanche

Vie de miettes,

Voilà, voilà. J’avais tout misé sur le printemps. Cela serait un renouveau. On fermerait les yeux. Et après le passage noir, on arriverait enfin au soleil à la lumière intense et apaisante. La fleur au niveau du cœur s’épanouirait à nouveau. On oublierait la distance et les rancœurs. Celles qui brisent, cassent, morcèlent. Le temps serait suspendu. Il ferait beau sur les lèvres et sur les regards. Les profondeurs intérieures et obscures s’atténueraient peu à peu. J’irais mieux pour le printemps, j’oublierais l’hiver, j’oublierais le mal. C’était prévu de cette façon là, imaginé comme ça. C’était d’une simplicité enfantine. C’était l’évidence comme le jour qui se lève chaque matin. Voilà. Je ne serais plus glacée à l’intérieur parce que le soleil a un énorme pouvoir. On m’a dit que la roue tourne, qu’après l’hiver viendrait le beau temps. C’était symbolique tout ça. Parce que cet hiver, au delà du froid, j’étais comme glacée de l’intérieur. Alors, je me suis fait les plus grandes promesses. J’ai juré au bonheur et à la vie devant moi. Le pire dans tout ça, je crois, c’est que j’y ai cru au plus profond de moi. Est-ce de ma faute au moi si j’y ai cru si fort ? Le vendredi 20 mars était gravé en moi. Cette journée sonnait comme un seuil. Le début de et la fin de. J’y ai cru comme on respire. Le printemps serait le commencement du bonheur. Le second semestre et la fin d’une boucle universitaire. Le nœud serait parfait. Il y aurait aussi notre appartement de rêve. Notre liberté. Son retour et l’oubli du mal. Du poids de la distance et des larmes. Le permis enfin. Le soleil sur nos visages. La validation de mon dossier pour une auberge espagnole. La légèreté et la douceur des journées ensoleillées. Cette liste était un rêve, un nuage de pensée. Un bonheur retrouvé et promis.

Et puis le printemps est arrivé ce vendredi. Le soleil était là mais. Il n’y a plus d’appartement de rêve. Envolé, fini. J’ai hésité à venir l’écrire ici. L’écrire, c’est mettre un point final au rêve. Le point et la fin est là. Les suspensions se sont faites la malle. Le permis s’est brisé sous ma pression. A trop le vouloir, il m’abat. Mamie est à l’hôpital depuis deux semaines. Sa fille handicapée, qui ne peut pas restée seule, pose problème. Alors, c’est moi qui la garde toute la semaine. Je m’enferme sur moi même. Je passe mes journées à attendre. L’université est bloquée depuis des semaines, bientôt des mois. L’intellect se fait la malle lui aussi. La motivation disparait. Il y aussi les rares cours encore dispensés où je ne peux pas assister, parce que je dois la garder. La validation du semestre qui s’efface un peu plus après chaque journée de blocage. Les résultats du premier semestre que j’attends toujours. Le dossier Erasmus bloqué à l’université. Chaque jour qui passe est une chance en moins de partir. Je le sais et j’en tremble. Le désordre intérieur. Les cailloux au creux du ventre. La fatigue et le temps de rien. Les cauchemars la nuit. Ce sont des palpitions de désespoir qui me submergent, qui s’abattent sur mes joues. Je me roule sur moi-même. Je me creuse et m’écroule. Je crois que je peux dire que non. Cela ne va pas, cela ne va plus. J’ai essayé. J’ai fait pour le mieux. On m’a dit que la roue tourne, qu’après l’hiver viendrait le beau temps. C’était symbolique tout ça. Je n’y crois pas, je n’y crois plus. Je ne veux plus attendre. Le vase est plein. Il ne faut plus me secouer. Les larmes débordent sur la chair meurtrie. Sur l’espoir froissé, déchiré, troué. C’est un effondrement interne. Des miettes de rêves s’éparpillent sur le sol. La douleur dévaste tout. Alors, comme toujours, on nous dit que cela passera. Que rien n’est une fatalité et qu’il faut se battre. On écoute mais on n’entend pas. On est gentil, alors on va faire comme si, faire semblant, se forcer un peu pour les autres et s’oublier beaucoup pour nous. Allez, on montre ses dents. On se fuit., se gribouille. On sort, un peu. On prend l’air. On boit un verre. On va au cinéma. On trinque au vide de l’existence et à la vie entre parenthèses. Et la nuit au milieu du silence, on déborde à nouveau. Les poings se crispent sur les draps. On se sent plus seule que jamais et l’on se dit que cela passera comme toujours.

Demain, cela ira mieux.


Si vous voulez en savoir plus, sur mon expérience Erasmus, vous pouvez aller à cette adresse.

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